Agriculture Durable
Laos

Reconversion d’une filière de transformation du bambou


Houaphanh est la province la plus pauvre du nord Laos avec un PIB par habitant en 2002 allant de 50 $ à 200 $ (la moyenne nationale étant de 350 $). Cette province présente pourtant d’abondantes ressources de bambou qui attirent l’intérêt d’industriels étrangers.

Afin d’exploiter, dans une optique durable, ces ressources, le GRET (Groupe de Recherche et d’Echanges Technologiques) a proposé un projet permettant de diversifier et d’accroître les revenus des populations locales, même les plus pauvres, dans les zones éloignées, tout en préservant les ressources naturelles et en renforçant les fonctions forestières.

Les personnes cibles de ce programme sont les acteurs investis dans la filière du bambou. Il s’agit de producteurs (individuels ou via des groupements dont la création est appuyée), de collecteurs (au niveau des districts et de la province), de pré-transformateurs et transformateurs (appui à la création d’ateliers sur les lieux de production).

Pour réaliser ce projet, les équipes du GRET proposaient, tout d’abord, de soutenir l’émergence et le développement de petits ateliers de transformation de bambou, avec créations d’emplois au plus proche des lieux de production et création de valeur ajoutée sur les villages.

Il était aussi prévu de mettre en place des relations commerciales, de mettre en réseau des microstructures locales, de former ces microstructures à la transformation du bambou et de les sensibiliser au respect de l’environnement.

Sur ce point, les résultats obtenus et leurs indicateurs sont les suivants :

  • 3 filières durables de produits en bambou, soutenues par la Fondation Ensemble, développées (90%) :
    • pousses de bambou comestible (hok) séchées ;
    • artisanat/vannerie : paniers pour riz gluant, cabas, etc…
    • lattes pour fabrication de stores, baguettes, sets de table, bâtonnets d’encens, etc…
  • 36 groupes de collecte et pré-transformation de bambou sont fonctionnels. (90%)
  • 4 ateliers de pré-transformation avec équipement collectif, personnel salarié et gestion entrepreneuriale sont fonctionnels. (100%)
  • 34 groupes ont des relations commerciales récurrentes avec les traders. (85%)
  • 1 353 familles ont un revenu additionnel stabilisé d’environ 150 euros/an. (200%)
  • Un projet de centre de service, des manuels et des posters ont été préparés pour renforcer la formation professionnelle dans les filières. (80%)
  • 28 techniciens villageois ont été formés sur l’artisanat, la plantation et le monitoring des forêts de bambou. (280%)

En parallèle, les équipes du GRET se proposaient de développer et d’adapter la gestion forestière pour répondre aux nouveaux débouchés des produits bambou (afin que les ateliers de transformation soient approvisionnés de matières premières durables). Sur ce point, les résultats et indicateurs sont les suivants :

  • 28 plans de gestion des sols (140%) et 17 plans de gestion forestières (85%) ont été approuvés par le district et 30 villages ont des plans de gestion forestière suivis annuellement. (150%)

Le projet a obtenu de très bons résultats, prometteurs pour une consolidation et une extension. Les autorités locales sont très impliquées dans les choix stratégiques. Les retours financiers sont déjà substantiels pour les bénéficiaires et les ressources forestières commencent à être gérées de manière durable.

Pérennité des actions menées :

Extrait de l’évaluation finale réalisée par réalisée par Paul SFEZ en août 2015

  • La pérennisation des actions menées est en bonne voie et prometteuse.
  • Après avoir d’abord été expérimentée, la gestion des forêts de bambou est dorénavant mise en place au niveau des villages, grâce au soutien des autorités locales et à l’existence de groupements de producteurs qui ont acquis les compétences nécessaires en matière de gestion, production, transformation et commercialisation. L’acceptation croissante des règles et règlementations, et les attentes des villageois concernant l’Enregistrement Foncier et l’Attribution des Titres de Propriété Communale illustrent la manière dont ces derniers, grâce au projet, s’investissent en tant que propriétaires dans la gestion des ressources de bambous. Les fournisseurs de services possèdent le savoir-faire nécessaire pour intervenir au plan technique et rencontrent une demande croissante de la part d’autres villages et projets. Les fonds de développement du bambou apportent une pérennité financière qui couvre les frais de gestion de la forêt et les frais de commercialisation. Néanmoins, les groupements de producteurs (Producer Groups – PG) ont encore besoin de s’améliorer, en particulier en ce qui concerne le contrôle forestier, la gouvernance, la gestion des dossiers et la gestion financière, la négociation et la transparence. Par ailleurs, la pérennisation économique de ces groupes de producteurs est menacée par le fossé existant en matière de règles et de fonctionnement entre les villages participant au projet et les autres villages. En effet le prélèvement de taxes destinées à assurer une pérennité financière de la gestion forestière et de l’activité commerciale, pousse les commerçants à réorienter leurs achats vers des villages non taxés. Dans la filière de l’artisanat en particulier, où existe une forte compétition entre les commerçants, les villageois rencontrent des difficultés à récupérer les taxes auprès de ceux qui ne sont pas enregistrés.
  • Bien que la mise en place de l’activité commerciale dans 4 filières différentes (dont 3 soutenues par la Fondation Ensemble) ait donné de bons résultats économiques, l’accès aux marchés reste fragile. Le marché des pousses de bambou comestible séchées (hok) au Vietnam est mal connu et son accès, ainsi que l’accès au marché chinois, souffre de l’exploitation des commerçants chinois qui continuent à imposer aux producteurs des techniques de séchage qui utilisent du soufre, ce qui représente un risque élevé de santé publique sur les marchés extérieurs, avec de possibles effets négatifs sur la filière dans la Province de Houaphanh. Le marché national pour ce produit, en dehors de la Province de Houaphanh, est encore peu développé. L’expérimentation du PGS (Participatory Guarantee System – Système de Garantie Participatif) avec plusieurs groupements de producteurs de bambou comestible et avec le soutien de l’IFOAM (International Federation of Organic Agriculture Movements – Fédération Internationale des Mouvements pour Une Agriculture Biologique) semble être une bonne option pour assurer l’accès au marché.
  • La capacité des autorités locales à mener des campagnes d’essais dans le secteur du bambou constitue aussi un facteur important de pérennisation de l’action menée. La révision des quotas et de la politique fiscale constitue un enjeu pour le développement futur du secteur du bambou (et d’autres secteurs).
  • La validation de la « Provincial Bamboo Strategy 2016-2020 » laisse présager du positif pour le futur.

Conclusion :

Extrait de l’évaluation finale réalisée par réalisée par Paul SFEZ en août 2015

  • La combinaison entre deux approches – territoriale et commerciale-, organisées autour d’éléments tels que la gestion des terres, la gestion forestière, les plantations, les affaires et le commerce, et la création, dans le cadre de la « Provincial Bambou Strategy 2011-2015 », d’un environnement favorable avec une approche multipartenariale, participative et inclusive, ont permis d’assurer la pertinence du projet.
  • L’excellente efficacité de ce projet est due aux bons résultats des prestations, ainsi qu’à une très bonne utilisation des processus d’apprentissage collectifs et de nombreux échanges et collaborations avec d’autres projets et forums nationaux. En conséquence de quoi, les revenus ont augmenté de manière significative (le revenu moyen annuel est de 166 $ par foyer) et des emplois ont été créés dans les activités parallèles. Les premiers objectifs de structuration du secteur du bambou ont été atteints, grâce à l’accroissement d’une gestion durable des forêts de bambou, grandement servie par un mélange d’activités issues de petites entreprises et une croissance généralisée des entreprises artisanales.
  • Enfin, l’évaluation recommande fortement une seconde phase, afin de consolider, étendre et approfondir le développement du secteur du bambou dans la Province de Houaphanh.

Conclusions de la visite ex-post (Mai 2018)

Ce projet, dont la pertinence a perduré au-delà de la période d’investissement initiale et dont les principaux résultats ont largement dépassé les objectifs initiaux, doit sa pérennité au regroupement durable des villageois au sein de « comités de village du bambou » (axés sur la gestion forestière) et de « groupements de producteurs » (axés sur la commercialisation des produits du bambou). Toutefois, la manifestation la plus visible de la pérennité de ce projet a consisté en l’établissement, fin 2017, de la Bamboo Non-Timber Forest Products Development Association (BNDA), qui vise à devenir une plateforme nationale pour la mise en œuvre d’une stratégie nationale du bambou.
Fin 2017, 4 950 hectares de forêt de bambou avaient été répartis entre 29 villages. Parallèlement, 2 800 ménages issus de 73 villages avaient été engagés dans 5 filières du bambou, qui ont permis en 2017 de générer un revenu supplémentaire de 200 dollars par ménage. Les actions entreprises grâce au soutien du GRET depuis 2011 ont produit des résultats extrêmement positifs en termes de gestion des forêts et des plantations de bambou, de création de débouchés commerciaux, d’augmentation des revenus pour les communautés villageoises, et de structuration de forums de dialogue entre les acteurs (au niveau des villages, du district, de la province et bientôt au niveau national).

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